Je rêve de devenir astronaute. Explorer là où personne n’a jamais mis les pieds.
Mes parents affirment que l’on peut découvrir de nouveaux mondes dans les souterrains terrestres, comme l’a fait mon cousin Bruno.
En effet, Bruno Bravoure est spéléologue amateur et fait partie d’un club de
Spéléologie Activité qui consiste à explorer, à cartographier, à étudier et à visiter des cavités souterraines.
Il aide à cartographier plusieurs grottes naturelles. Sa fiancée, Althéa Angelos, fait partie du même club, en plus d’être chercheuse à l’université.
Demain, pour la troisième fois de ma vie, j’accompagnerai Bruno et Althéa dans une expédition. On visitera un
Gouffre Cavité très profonde.
gigantesque appelé Goliath!
Ce soir, au téléphone, Bruno m’a demandé :
— Tout est prêt, Mika?
En parcourant ma liste de matériel et d’équipement, j’ai répondu :
— Combinaison, bottes, gants, casque et lampe. C’est bon!
— Super! Je me charge des cordes, de
Mousquetons Boucles à ressort servant à accrocher une corde d’escalade ou à la décrocher très rapidement.
et de ton baudrier.
— Mon baudrier?
— La ceinture que tu dois passer autour de ta taille et de tes cuisses, m’a rappelé mon cousin.
— Oups! J’avais oublié.
— Je suis là pour ça, cousine! Allez, bonne nuit! Je passe te prendre tôt demain matin.
La joue sur l’oreiller, je n’arrive pas à m’endormir. Mon excitation grimpe, grimpe et grimpe encore! Demain, je vais passer plusieurs heures sous terre, dans le froid, dans le noir, peut-être même avec des chauves-souris et des araignées! J’ai hâte!
Le lendemain, Bruno, Althéa et moi sommes devant la bouche minuscule de Goliath. J’éclate de rire :
— C’est tout petit!
— Cette entrée est trompeuse, Mika, m’avertit Bruno.
— L’intérieur contient de larges
Galerie Passage ou couloir souterrain.
, renchérit Althéa.
Bientôt, le sol nous avale un par un.
Nos lampes de casques allumées, nous descendons à quatre pattes dans la gorge de Goliath, un long tunnel creusé par l’eau. Après de longues minutes à suivre Althéa, mes genoux tremblent un peu. Derrière moi, mon cousin m’encourage :
— L’estomac du géant n’est pas loin maintenant. Nous pourrons nous mettre debout bientôt.
Nous débouchons sur une salle immense avec des formations pointues au plafond.
— Des
Stalactite Formation créée par l’eau qui tombe du plafond d’une caverne et renfermant plusieurs petites particules de calcaire.
âgées de plusieurs millénaires, déclare Bruno.
Impressionnée, je m’exclame :
— Waouh!
— C’est ici? demande mon cousin à sa fiancée.
— Non, répond Althéa, le trésor ne se trouve pas dans l’estomac, mais dans le ventre de Goliath.
Stupéfaite, je demande aussitôt :
— Il y a des pierres précieuses ici?
Secouant la tête, Althéa m’explique :
— Le trésor dont je parle n’est pas un
Joyau Objet précieux.
, mais une bactérie servant à fabriquer des antibiotiques.
Mes yeux brillent comme des étoiles. Je m’écrie :
— Des médicaments! C’est génial!
— En effet, renchérit la chercheuse, la solution à certaines maladies pourrait se trouver dans Goliath! Je dois récolter des échantillons provenant de stalactites.
— Des stalactites? Il y en a partout autour de nous.
— Pas ceux-là. La bactérie recherchée vit sur des stalactites en forme de
Sécrétions Substances solides, liquides ou gazeuses que produisent certains tissus ou certaines glandes du corps humain.
nasales.
— Beurk! Des stalactites ressemblant à de la morve!
Althéa rit avec moi et me confie :
— On fait son possible pour le bien-être de l’humanité.
— Nous devons descendre encore plus dans les profondeurs de cette
Cavité Partie très creuse ou espace vide.
, m’annonce Bruno. Prête à continuer, Mika?
— Prête!
Le trajet de l’estomac vers le ventre passe par un tunnel
Pentu Qui présente une pente ou qui est incliné.
. On n’a pas à nous agenouiller, mais le chemin est ardu. Le sol est irrégulier avec d’innombrables creux et bosses. L’air se refroidit : une brise glaciale me gifle les joues par moments. J’ai l’impression que Goliath ne veut pas de notre présence. Soudain, je manque de déraper. Vite! Je stabilise mon corps. Je veux continuer cette aventure
Sans broncher Expression qui signifie sans hésiter, sans montrer ses émotions.
et en un seul morceau.
Devant moi, Althéa s’arrête. Elle informe Bruno :
— Il faut s’attacher à un point d’ancrage pour descendre dans ce trou vertical.
— Cherchons celui que le club a déjà installé, conseille Bruno. Il doit être quelque part par ici.
Nous inspectons la
Paroi Face située sur le côté, proche de la verticale; surface abrupte.
ruisselant de gouttelettes d’eau.— Je l’ai trouvé! je m’écrie. Ici!De la buée sort de ma bouche à cause du froid.— Bien joué, Mika! me félicite mon cousin.L’instant suivant, à l’aide d’une corde attachée à nos baudriers par des mousquetons et reliée à un mécanisme de poulies, on descend un par un dans les entrailles de Goliath. Bruno d’abord, puis moi. Mes bottes s’enfoncent dans la glaise. Althéa descend à son tour.Catastrophe! Deux mètres avant qu’elle atterrisse, la corde se rompt brusquement. Pac!
Oh non! La chercheuse tombe lourdement par terre. Pouf! Crac!
— Althéa! s’exclame Bruno en se précipitant vers elle.
Le visage de sa fiancée se tord de douleur. Alarmée, je hurle :
— APPELONS LES SECOURS!
— Ma… cheville gauche, souffle Althéa.
Bruno l’aide à s’adosser contre une paroi rocheuse. Moi, j’insiste :
— Tiens bon! On va appeler le 911!
À mon grand désarroi, Bruno m’annonce :
— Mika, les téléphones ne marchent pas si profondément sous terre.
Comment appeler les secours, alors? Comment remonter à la surface, alors que la corde s’est brisée et qu’il n’y a personne en haut pour nous en envoyer une autre?
Mes jambes sont molles comme de la guimauve. Je m’assois à côté d’Althéa en regardant mes bottes.
« Mika, ça va? » demande Bruno.
Aucune réponse ne sort de ma bouche, mais les questions se multiplient dans ma tête. Va-t-on rester ici longtemps? Un jour? Une semaine? Comment va-t-on survivre? Quand reverrais-je mes parents? Et si personne ne vient nous chercher? Oh là là!
Deux pensées lumineuses percent mon nuage de désespoir.
J’entends la voix de Maman dans ma tête : « Certains événements peuvent nous décourager, mais ne baissons pas les bras trop rapidement. »
Un conseil de Papa m’éclaire : « Parfois, une situation difficile peut être l’occasion de dévoiler nos qualités. »
Je prends trois grandes respirations. Si je veux devenir astronaute, je ne peux pas me laisser paralyser par la peur. Je dois penser au bien de l’équipe et à notre mission.
Je me remets debout et j’annonce clairement :
— Cherchons une solution ensemble!
Bruno me tape affectueusement l’épaule.
— Bravo, Mika! dit-il. Ce n’est pas pour rien qu’on s’appelle Bravoure!
Quelques minutes plus tard, je gravis la paroi, m’agrippe à des pointes de rochers, me hisse avec mes mains gantées, fléchis mes genoux et me pousse vers le haut du bout des bottes. J’escalade une mince fissure dans le ventre de Goliath. Ce passage est connu des membres du club de spéléologie. Mais, il est trop étroit pour la grande taille de Bruno. Althéa aurait pu s’y faufiler, mais pas avec sa cheville blessée. Alors, je suis LA solution à nos problèmes!
Le premier problème, le plus pressant : appeler les renforts. Pour cela, je dois remonter vers la surface jusqu’à ce que le cellulaire que m’a donné Bruno fonctionne.
Le second problème, le moins urgent : récolter des échantillons de la surface de stalactites ressemblant à de la morve. Pour ce faire, Althéa m’a remis une éprouvette et des tiges de coton ouaté.
Je ne sais plus depuis combien de temps j’avance. La fatigue engourdit mon corps et mon esprit. Mais, je ne lâche pas. Je me concentre sur les paroles d’encouragement de mes parents, qui me donnent de l’élan. Je vérifie le signal du téléphone de Bruno, sans doute pour la vingtième fois. Enfin! Je pousse un soupir de soulagement. Fiou!
Deux heures plus tard, en plein air, je regarde des secouristes tirer la civière d’Althéa de la petite bouche de Goliath. Bruno en sort à son tour. On se donne des câlins. Althéa me remercie chaleureusement. Fier de moi, Bruno me félicite de ma débrouillardise.
Avant qu’Althéa entre dans l’ambulance, je lui remets un petit cadeau en disant :
— J’espère que tu réussiras à développer cet antibiotique.
La chercheuse n’en croit pas ses yeux. Elle prend l’éprouvette en souriant largement :
— Moi, je te souhaite que tous tes rêves se réalisent!
Je m’appelle Mika Bravoure. Un jour, j’aimerais visiter d’autres planètes, à la recherche de trésors extraterrestres. Et je ferais cela pour le bien-être de l’humanité.